Mon avis sur Les Archives Tintin (Atlas), vol. 4 – Tintin au pays des Soviets

Tintin au pays des Soviets est un album délicat à aborder – bien plus que Tintin au Congo. D’abord parce qu’il s’agit du seul album que Hergé n’a absolument pas retouché. C’est un fac-similé des planches, telles qu’elles ont été publiées entre 1929 et 1930 dans les pages du « petit XXème« , qui constitue l’album actuel, et non des planches redessinées et un scénario retouché par un Hergé déjà plus expérimenté, comme ce sera le cas pour Tintin au Congo, Tintin en Amérique, etc.

Le trait de Hergé est, par conséquent, fort différent de celui que nous lui connaissons dans le reste de la collection des « Aventures de Tintin ». Pour un lecteur non averti, le choc est donc d’autant plus rude que Hergé s’est efforcé de gommer son évolution graphique dans les autres albums au fil du temps.

Mais l’album est également délicat à aborder en raison du message « politique » et « idéologique » qu’il véhicule. Un contexte qu’on ne peut aborder sereinement si on ignore les motivations de Hergé (c’est à la demande de son « Patron », l’abbé Wallez, que Hergé dessine ces planches qu’il considère à l’époque comme une « farce » selon ses propres mots) et ses sources documentaires encore pauvres, fragmentaires et peu critiques (Hergé s’inspire pour l’essentiel, et sur conseil de l’abbé Wallez, d’un livre intitulé « Moscou sans voiles »).

Tintin au pays des Soviets est donc un double choc, graphique et idéologique, pour un lecteur du XIXè siècle. C’est pourquoi, à mon avis, cet album mériterait également un court dossier d’introduction dans sa version « Casterman » (album classique) afin d’expliquer les motivations de Hergé et le contexte de la création de cet album.

Nous assistons dans cet album à la double naissance d’un dessinateur de génie et de son personnage le plus célèbre ; un dessin encore « brut » réalisé par un jeune auteur qui n’en a pas encore fait une œuvre personnelle. Si on devait traduire en termes modernes c’est qu’est réellement Tintin à l’époque de sa naissance, nous dirions qu’il s’agit d’un « concept marketing destiné à faire vendre un supplément destiné à la jeunesse et intitulé le petit XXème, publié par un quotidien belge catholique et de droite ». Et nous savons à quel point le concept a eu du succès –c’est d’ailleurs cette réussite qui a permis à Tintin de s’affranchir des carcans idéologiques dans lesquels il voit le jour.

La figurine qui accompagne l'album.

La figurine qui accompagne l’album.

Après cette envolée historico-philosophique, voici ce que contient exactement l’album.

JOURNAL 1929-1930 (PP. 5-7)

HERBERT HOOVER PRÉSIDENT DES ETATS-UNIS – CRISE EN YOUGOSLAVIE – LE VATICAN, ÉTAT SOUVERAIN – LE PLAN YOUNG SAUVE LES RÉPARATIONS – AFFRONTEMENT À JÉRUSALEM – FRICTION SINO-SOVIÉTIQUE – QUERELLE LINGUISTIQUE : CHUTE DU CABINET BELGE – JEUDI NOIR À WALL STREET – URSS : CRÉATION DES KOLKHOZES – GUERRE CIVILE EN CHINE – ÉMEUTES AUX INDES – LE GRAF ZEPPELIN BOUCLE SON TOUR DU MONDE – SUR LES ÉCRANS

LES SOURCES DE L’ŒUVRE (PP. 8-15)

UN ALBUM LU EN FAMILLE – LEVÉE TARDIVE DE BOUCLIERS – VOILE D’OPPROBRE SUR MOSCOU SANS VOILES – QUI DIRIGE L’URSS DANS LES ANNÉES VINGT – UN LIVRE ÉPOUVANTAIL POUR UN ÉTAT ÉPOUVANTAIL – LE BOLCHÉVISME DES ANNÉES VINGT – EXEMPLES TARDIFS – LA LEÇON À TIRER – LE GUÉPÉOU À L’ÉTRANGER : L’AFFAIRE KOUTIEPOV

REVUE DE DÉTAILS (PP. 16-17)

FANTAISIE – LES UNIFORMES

LES SECRETS D’UNE CRÉATION (PP. 18-22)

TENUE LOCALE – MASQUAGE ET DÉMASQUAGES – OBSCURITÉS MÉCANIQUES – LE VIEUX FUSIL – REPENTIRS – FIGURES ÉQUESTRES

LES ACTEURS (PP. 23-29)

TINTIN (LA GESTATION – PREMIERS PAS DANS L’AVENTURE – LES HÉSITATIONS DE LA CROISSANCE) – MILOU (LA PART HUMAINE DE TINTIN – DE LA FAIBLESSE… – … À LA DÉBAUCHE – GÉNÉALOGIE – DESTIN) – BOUSTRINGOVITCH – LULITZOSOFF – RODROBERTINE – SOLOWZTENXOPZTZKI – WIRCHWLOFF – WLADIMIR – ZWAENEPOEL – PARMI LES FIGURANTS, NOUS REMARQUONS (UN IGNOBLE TERRORISTE BOLCHEVIQUE – DES SCHUPOS – UN COMMISSAIRE DU PEUPLE – UN TAILLEUR ISRAÉLITE – UN MOUCHARD DU GUÉPÉOU – DES COMMUNISTES ANGLAIS – DES ANIMATEURS D’ÉLECTIONS À MAIN LEVÉE – LE CONDUCTEUR D’UNE CITERNE HIPPOMOBILE – UN DIRECTEUR DE PRISON MONGOLOÏDE – DES TORTIONNAIRES CHINOIS – UN RESPONSABLE DU PARTI – UN OFFICIER DE L’ARMÉE ROUGE – LE GARDIEN DU TRÉSOR BOLCHÉVIQUE – UN RESPONSABLE DU GUÉPÉOU EN ALLEMAGNE – DES ANIMAUX DE BASSE-COUR – LES ADMIRATEURS DE TINTIN)

ANNONCES ET INÉDITS EN ALBUM (PP. 30-31)
L’ALBUM – TINTIN AU PAYS DES SOVIETS (PP. 33-173)

PENDANT CE TEMPS LÀ… HERGÉ (PP. 174-197)

CHRONOLOGIE HERGÉ 1882-1930 (DEUX COMPLICES DE LA GRANDE ÉPOQUE : JOSÉ DE LAUNOIT ET PHILIPPE GÉRARD – L’ABBÉ NORBERT WALLEZ – LA PREMIÈRE ÉPOUSE D’HERGÉ : GERMAINE KIECKENS) – LES AUTRES HÉROS (TOTOR C.P. DES HANNETONS – FLUP, NÉNESSE, POUSSETTTE ET COCHONNET) – LES AUTRES ACTIVITÉS (LA PRESSE – LA PUBLICITÉ – ILLUSTRATIONS – PROGRAMMES ET PLAQUETTES – CARTES POSTALES)

COLLECTIONNEURS ET COLLECTIONS (PP. 198-200)

COUVERTURES ET COTES DES DIFFÉRENTES EDITIONS DE L’ALBUM – BIBLIOGRAPHIE – EDITIONS ÉTRANGÈRES ET TRADUCTIONS RÉGIONALES

Voici mon avis détaillé sur le contenu.

I. Préface

Journal 1929-1930

Un rappel du contexte historique des années ’30 qui nous permet de mesurer à quel point notre monde du XIXème siècle est éloigné de cette époque, et pourtant proche par certains aspects. Cette revue de l’actualité est complétée dans la section « Les sources de l’œuvre » par un bref résumé de l’histoire politique de l’URSS depuis 1917 (principalement l’ascension de Staline au pouvoir). Le tout est indispensable pour comprendre le contexte historique de l’album.

Les sources de l’œuvre

Les auteurs décrivent ici avec pertinence et justesse le contexte éditorial (supplément pour la jeunesse d’un journal Catholique belge anti-communiste) et artistique (un jeune dessinateur aux ordres d’un directeur éditorial issu du clergé) de l’album. Ils présentent en détail la principale source d’inspiration imposée à Hergé par l’abbé Wallez : le livre de Joseph Douillet intitulé « Moscou sans voiles », le courant idéologique représenté par ce livre et les réactions hostiles que suscitera l’album plus tard. Leurs propos sont illustrés par des affiches anti-bolchéviques de l’époque (dont certaines de la plume de Hergé) et quelques photos. Une analyse passionnante qui montre à quel point, au travers de son personnage Tintin, Hergé est un témoin engagé, mais encore naïf, de son époque.

Revue de détails

Cette rubrique a le mérite de nous monter que, dès ses débuts, Hergé s’est attaché à l’authenticité des détails (véhicules, uniformes, bâtiments). Hergé se documente, même si sa documentation est encore très limitée.

Les secrets d’une création

Cette rubrique m’a laissé, comme toujours, un arrière goût de trop peu. Et toujours cette conviction qu’il ne s’agit de rien d’autre qu’une continuation de la « Revue de détails ».

Les acteurs

Comme toujours, c’est cette rubrique qui a mes faveurs. D’autant que dans Tintin au pays des Soviets, les personnages sont extrêmement nombreux, mais très peu développés. Une lecture passionnante, qui aborde à la fois la naissance et l’évolution graphique de Tintin, la naissance et le rôle de son fidèle compagnon Milou, ainsi que la foule de personnages secondaires qui peuplent l’album. Les auteurs confirment une fois de plus que c’est dans l’étude des personnages des albums qu’ils excellent. Le clin d’œil de Hergé à Benjamin Rabier ne leur a bien évidemment pas échappé, même si je ne partage pas tout à fait leur opinion quant au « plagiat » que constituerait selon eux cet hommage de l’élève au maître.

II. L’album

Les 141 pages d’une course poursuite au cheminement parfois tortueux nous attendent. Tintin semble errer sans but et se laisser d’avantage porter par l’aventure que d’en être l’acteur principal. A défaut d’un scénario consistant, Hergé fait avancer l’histoire à coups de gags dont l’humour particulier préfigure les facéties de Quick et Flupke.

III. Postface

Une postface très intéressante, qui nous brosse le portrait de Hergé depuis sa naissance jusqu’à ces débuts en tant qu’illustrateur. Y sont également abordés ses débuts dans le monde de la publicité, son attachement au scoutisme ainsi que plusieurs personnalités clefs dans la vie d’Hergé (l’abbé Wallez, Germaine Kieckens – première épouse de Hergé, et ses complices de la première heure : José De Launoit et Philippe Gérard). Les nombreuses illustrations dans cette rubrique permettent de se faire une idée de l’étendue du talent « graphique » de Hergé à l’époque. Des dessins pour les revues scouts aux titres de rubriques pour le quotidien le XXème siècle, en passant par les affiches publicitaires et les illustrations de couverture, une palette de styles très large pour un dessinateur dont le génie s’exprime déjà pleinement. Ce sont assurément là les pages les plus riches des archives Tintin.

Conclusion

Tintin au pays des Soviets est de loin l’album qui me parle le moins dans les « Aventures de Tintin ». Un scénario quasi inexistant, un graphisme maladroit, il n’a pour moi qu’un intérêt documentaire, en ce qu’il porte déjà en lui le germe des futures aventures de Tintin. C’est un album de débutant, et Hergé l’avouera lui-même, il est dessiné par un auteur qui ne prend pas encore son travail très au sérieux.

 

Mais encadré et enrichi comme il l’est ici, ce volume devient l’un des fleurons des Archives Tintin. Avec près de 200 pages, c’est également le plus volumineux de la collection. Un album indispensable pour tout tintinophile qui se respecte !


Mon avis sur Les Archives Tintin (Atlas), vol. 3 – L’Alph-Art

Album controversé s’il en est – même son statut d’album à part entière étant discutable – l’Alph-Art est le volume des Archives Tintin que j’attendais avec le plus d’impatience. Et je n’ai pas dû attendre bien longtemps, les Editions Atlas ayant eu l’excellente idée de l’inclure dès leur troisième envoi reçu ce 20 mars.

Cette fois, sac-à-dos en cadeau oblige, j’ai reçu l’album dans une boîte cartonnée tellement fragile que le fond et le système de fermeture avaient tous deux lâchés, le tout m’ayant été présenté ouvert avec le contenu éparpillé… mais intact et complet. Les Editions Atlas aiment décidément jouer avec le feu.

La figurine et le sac-à-dos reçus en cadeau.

La figurine et le sac-à-dos reçus en cadeau.

Voici ce que contient exactement l’album.

JOURNAL 1977-83 (pp. 5-7)
JIMMY CARTER, PRÉSIDENT DES ÉTATS-UNIS – RAID SUR KOLWEZI – ÉCLAIRCIE AU PROCHE-ORIENT – LE CHAH RENVERSÉ – LONDRES : UNE FEMME PORTE LA CULOTTE – RONALD REAGAN ÉCRASE JIMMY CARTER – UN CARABINIER AUX CORTÈS – LA PLANÈTE MITTERAND – LES MALOUINES : UNE QUESTION DE PRINCIPE – ISRAËL CONTRE LE LIBAN – SUR LES ÉCRANS – EN BREF
LES SOURCES DE L’ŒUVRE (pp. 8-15)
NOUVEAU LECTORAT – RÉSISTANCES ET TENTATIONS – LA RECHERCHE DE L’APAISEMENT – L’ART ABSTRAIT, CETTE AUTRE GALAXIE MENTALE ? – L’ART CONTEMPORAIN ET SON REFLET DANS : L’ALPH-ART – CONTRADICTIONS – SECTE ET GALERIE- CONFLIT INTIME – S’ADAPTER – LA PUISSANCE DU PASSÉ
LES SECRETS D’UNE CRÉATION (pp. 16-20)
RIPAILLE TRIDÉMENTIELLE – DÉFOULEMENTS PÂTISSIERS – LA FAUNE DES VERNISSAGES – UN HADDOCK AD HOC – EN PASSANT PAR LE ROND-POINT – LE CAS AKASS
LES ACTEURS (pp. 21-23)
TINTIN – MILOU – HADDOCK – AKASS – BEN KALISH EZAB – CASTAFIORE – SNOBISME, MÉPRIS ET COPINAGE – CHICKLET – DUPONDT – TOURNESOL – FLEUROTTE – FOURCART – GIBBONS – HARTIMONT – LAIJOT – LAMPION – MONASTIR – NASH – NESTOR – RANDAZZO – RASTAPOPOULOS – SAKHARINE – SORDI – TRICOT – VANDEZANDE – ZOLOTAS
L’ALBUM – L’ALPH-ART (pp. 25-89)
PENDANT CE TEMPS… HERGÉ ! (pp.92-98)
CHRONOLOGIE HERGÉ
LES AUTRES ACTIVITÉS (pp.99-115)
LA PRESSE – (LE JOURNAL TINTIN 1972-1983) – LA PUBLICITÉ – SÉRIGRAPHIES ET AFFICHES PROMOTIONNELLES – CARTES DE VŒUX
LE DÉCÈS D’HERGÉ DANS LA PRESSE (pp. 116-117)
HERGÉ… LE DÉFI DU XXIE SIÈCLE ! (pp. 118-129)
CHRONOLOGIE HERGÉ 1984-2011
BIBLIOGRAPHIE (p. 130)
ÉDITIONS ÉTRANGÈRES ET TRADUCTIONS RÉGIONALES (p. 130)

Voici mon avis détaillé sur le contenu.

I. Préface

Journal 1977-83

Pour avoir vécu cette époque, la présentation historique éveille en moi une pointe de nostalgie. Moins pertinente par rapport au thème de l’album, elle est pourtant l’occasion, pour les auteurs, de se défouler dans leur éditorial contre la montée en puissance du libéralisme – ou capitalisme sauvage. C’est un véritable plaidoyer contre la mondialisation et la perte des valeurs humanistes, un regard critique sur la fin du XXe siècle dont les conclusions restent d’actualité aujourd’hui. On s’éloigne bien sûr de Tintin et Hergé à proprement parler, même si cela permet de comprendre à quel point Hergé a dû se sentir décalé par rapport à cette fin de siècle.

Les sources de l’œuvre

Les auteurs se livrent ici à une analyse des plus pertinentes, et parfois un peu caustique, du contexte dans lequel Hergé situe son album. Le milieu de l’art contemporain : ses vaniteux, ses parasites, sa faune exotique, ses illusionnistes, ses carnassiers, et Hergé en quête d’une nouvelle voie et d’un nouveau sens à donner à sa vie. Une analyse qui aurait facilement pu déraper, mais les auteurs ont réussi ici le tour de force de ne jamais trahir cette œuvre pourtant restée inachevée (pour ne pas dire à peine entamée). J’applaudis des deux mains, c’est assurément l’un des moments forts de ces Archives Tintin. Quant aux points de vue défendus par les auteurs, on peut ne pas être d’accord mais le débat qu’ils suscitent reste toujours en accord avec l’album projeté par Hergé.

Les Secrets d’une création

Philippe Goddin passe essentiellement en revue les différents éléments ayant inspiré les personnages et lieux que Hergé avait présélectionnés pour son album, et ses premières hésitations quant à la forme d’art contemporain qu’il pourrait tourner en dérision : pop-art (j’aurais plutôt parlé de food-art), Tart-art (la nourriture toujours) et finalement Alph-Art. Je suis certes resté sur ma faim (malgré deux arts culinaires), mais sans doute l’essentiel des archives est-il déjà exploité dans l’album à proprement parler.

Les acteurs

L’album n’étant qu’une ébauche d’album, j’imagine le tour de force qu’a du représenter la rédaction de cette rubrique. Nul ne sait le sort que Hergé allait réellement réserver aux différents personnages – certains auraient même pu être écartés en cours de rédaction. Elle est donc nettement plus courte que dans les volumes précédents, mais reste intéressante.

II. L’album

Parlons-en de cet « album » et des controverses qu’il a déjà suscitées. Pour commencer, j’approuve totalement le choix initial de Fanny Rodwell de présenter au public un album inachevé composé de deux volumes : l’un contenant la transcription des dialogues, l’autre le découpage graphique. Cette forme me semble la plus appropriée à un album qui n’en était encore qu’au stade de l’ébauche. Le scénario, c’est le premier jet de l’histoire. Les ébauches graphiques représentent déjà une étape suivante, une évolution de ce premier jet avec certaines remises en question. Ce qui justifie de les garder séparés. Mais on pourra reprocher à cette formule qu’elle rend l’ensemble moins « accessible » et moins « lisible » pour le grand public.

L’intégration de l’Alph-Art dans la collection classique des Aventures de Tintin, en revanche, est à mon sens une trahison. J’y vois un manque de respect à l’encontre de l’auteur : les dessins, croquis, planches, manuscrits et tapuscrits n’étaient pas destinés à la publication et méritent un traitement particulier. La première édition réussissait ce tour de force, la formule « en album », par contre, crée la confusion entre un texte et des illustrations qui n’en sont pas la traduction fidèle. Bien entendu, la formule « album » est plus vendeuse que le diptyque au format « art book ». Combien de lecteurs se sont fait avoir, croyant acheter un album Tintin classique pour se retrouver avec une ébauche d’album faite de croquis en regard d’un texte continu ?

Les Archives Tintin font-elles mieux ? Non ! La réponse est même : elles font pire ! Les 132 pages de la première édition en deux volumes, réduites à 104 pages dans l’album classique ont été concentrées ici en 62 pages ! De nombreuses planches sont ainsi réduites à la taille de cartes postales. Je reste sans voix face à ce triste massacre de ce qui fut une excellente initiative au départ : la publication d’un germe d’album, d’un album en devenir, laissant deviner les doutes, les volte faces, les fouilles graphiques de l’artiste qui tient le crayon. Rendez-nous l’Alph-Art !

III. Postface

La chronologie Hergé couvre 4 années et s’étale sur 7 pages. Très richement et joyeusement illustrée, elle est suivie d’un non moins long aperçu des activités du studio durant la même période.

Ensuite, les auteurs abordent avec beaucoup de retenue et de délicatesse l’épisode douloureux du décès de Hergé. Ils ont préféré laisser, pour l’essentiel, la parole aux autres en présentant un choix d’articles de presse de l’époque. Un très bel hommage, particulièrement émouvant.

Ils rebondissent ensuite dans la rubrique Hergé… Le défi du XXIe siècle en brossant un panorama des publications et initiatives visant à faire vivre l’œuvre de Hergé depuis 1984 jusqu’à 2011. Une très bonne idée. On y trouve pêle-mêle les expositions, l’ouverture de boutiques, la fermeture du Studio au profit de la Fondation, la décoration de la station de métro Stockel à Bruxelles, les biographies, jeux, jeux vidéos, films et bien entendu le musée Hergé à Louvain-la-Neuve, et bien d’autres encore, trop nombreux à énumérer. L’œuvre de Hergé est vivante, on n’en doute pas après avoir lu cette rubrique. Le volume se referme sur la bibliographie et le panorama des différentes éditions, forcément limités à une seule page.

Conclusion

Avec 50 pages de suppléments, ce volume est bien plus riche en documents et commentaires que les deux précédents. De plus, le contenu même des dossiers dépasse en qualité ce que j’ai pu lire jusqu’à présent dans les Archives Tintin.

Heureusement, car l’album en lui-même est une très grande déception. Pas par son contenu, mais par sa présentation. Le pari d’une « édition ultime » est donc raté en ce qui concerne l’Alph-Art. De nombreuses planches étant réduites aux dimensions de cartes postales, il faudra donc faire l’acquisition de l’album classique, ou mieux, du diptyque paru en 1986 pour ceux qui en ont les moyens, si l’on veut découvrir les planches inachevées de Hergé dans les meilleures conditions.

Le compromis est décidément difficile à trouver : reprendre les 132 pages publiées naguère en deux volumes était utopique ; garder les 104 pages de l’album Casterman, et limiter les suppléments à une vingtaine de pages aurait été dommage vu la qualité et l’intérêt indéniable des documents et annexes présentées. Il faudra donc accepter le sacrifice d’une trentaine de planches, reproduites en taille réduite, pour pouvoir profiter des suppléments qui ne déçoivent pas dans l’ensemble.

L’Alph-Art version Archives Tintin est donc lui aussi sujet à polémique… en cela, Atlas respecte parfaitement la tradition. Feront-ils mieux avec Tintin au pays des Soviets, le prochain envoi annoncé ? Ou aurons-nous également droit à une débauche d’annexes et un album amputé d’un tiers de ses planches ? Vous le saurez en lisant le prochain épisode des Archives Tintin sur tintinologie.com.


A la recherche de la Licorne perdue – recherche des origines de la vraie Licorne

En juin 1942, Hergé publie dans Le Soir, sous forme de strips quotidiens, l’aventure de Tintin qui deviendra l’album Le Secret de la Licorne.

Pourtant, l’album ne nous dévoile pas tous les « secrets » de la Licorne. En effet, il est connu que Hergé a sollicité l’aide de plusieurs connaissances et amis pour se constituer une documentation crédible sur la marine du XVIIe siècle. Parmi ceux-ci, citons Gérard Liger-Belair qui corrigera les dessins de Hergé, fournira un plan et une maquette de la Licorne.

Gérard Liger-Belair affirme également avoir suggéré le nom Licorne à Hergé, et que la Licorne était un vaisseau de la marine française du XVIIe siècle qui fut coulé lors de la bataille de la Hougue en 1692.

J’ai voulu en avoir le cœur net, je suis donc parti en quête de cette Licorne. Et j’ai fait d’étonnantes découvertes ! Mais une Licorne peut toujours en cacher une autre.

Le fruit de mes recherches est résumé dans le document ci-dessous (PDF – 10 Mo).

A la recherche de la Licorne perdue

Bonne lecture !


Mon avis sur Les Archives Tintin (Atlas), vol. 2 – Le Trésor de Rackham Le Rouge

Réception ce 28 février du deuxième envoi Atlas, toujours dans une simple enveloppe cartonnée. Sauf que cette fois, le facteur a déposé un avis de passage, et l’enveloppe m’attendait bien au sec dans le Point Poste à proximité de chez moi… Mais l’enveloppe était ouverte (curiosité du facteur ou accident ?)! Le contenu était heureusement intact (pfffff !). Donc, aucun changement quant au format de l’envoi… Atlas aime prendre des risques…

L’album, sous blister, présente les mêmes caractéristiques que le précédent (et que tous les autres volumes de la collection). Inutile donc de s’y attarder. Le second envoi Atlas est accompagné de l’habituelle figurine ainsi que de deux jeux de cartes (un jeu de 52 cartes à jouer et un jeu de « familles »).

La figurine et les deux jeux de cartes reçus en cadeau.

La figurine et les deux jeux de cartes reçus en cadeau.

Voici ce que contient exactement l’album.

JOURNAL 1943 (pp. 5-7)
ÉDITORIAL – L’ARMÉ ROUGE EST EN UKRAINE – LA TUNISIE EST REPRISE – LES ALLIÉS DÉBARQUENT EN SICILE – CHUTE DU RÉGIME FASCISTE – LES ALLIÉS REPRENNENT PIED EN ITALIE – L’ALLEMAGNE SOUS LES BOMBES – BOMBARDEMENTS ALLIÉS EN FRANCE – GUERRE DU PACIFIQUE – ANVERS ET BRUXELLES BOMBARDÉS – LONDRES AVEC ALGER – CRÉATION DU STO – LE MARCHÉ NOIR FAIT MONTER LES PRIX – VIE QUOTIDIENNE – SUR LES ÉCRANS
LES SOURCES DE L’ŒUVRE (pp. 8-9)
REVUE DE DÉTAILS (pp. 10-14)
LE SCAPHANDRE – QUELEGRANDCRICMECROQUE ! – ZAZOU – LA COLONNE MORRIS (À LA MODE DE BRUXELLES) – SIRIUS – LE CALENDRIER DE ROBINSON CRUSOÉ – LA REPRÉSENTATION DE L’EUROPÉEN DANS L’ART AFRICAIN ET AMÉRINDIEN – LE SOUS-MARIN DU PROFESSEUR – LES PERROQUETS BAVARDS ET GARDIENS DE LA MÉMOIRE
LES SECRETS D’UNE CRÉATION (pp. 15-19)
DANS LA CAVE DU BROCANTEUR – L’ESQUIF AD HOC – LE TEMPS CONTRACTÉ – VU DANS MATCH – LE PENDULE QUI DIT VRAI – QUESTIONS DE CALCUL – RETOMBER SUR SES PATTES
LES ACTEURS (pp. 20-27)
TINTIN – HADDOCK – NESTOR – DUPONDT – TOURNESOL (SES ORIGINES – LES GRANDS MODÈLES – JURISPRUDENCE PERSONNELLE – LA SILHOUETTE – LÉGÈRETÉ – LA MARQUE DU DESTIN – TOURNESOL MODÈLE 1943. LES TRÉSORS CACHÉS) – DR. DAUMIÈRE – LOISEAU – RACKHAM-LEROUGE – ROUGET – VAN DAMME – PARMIS LES FIGURANTS, NOUS REMARQUONS (UN JOURNALISTE INDISCRET – UN BROCANTEUR DE MARINE)
ANNONCES ET INÉDITS EN ALBUM (pp. 28-29)
L’ALBUM – LE TRÉSOR DE RACKHAM LE ROUGE (pp. 31-97)
PENDANT CE TEMPS… HERGÉ (pp. 98-123)
CHRONOLOGIE HERGÉ 1943 – LES AUTRES HÉROS (DUPONT ET DUPOND, DÉTECTIVES) – LES AUTRES ACTIVITÉS (LA PRESSE – L’ÉDITION – ILLUSTRATIONS – MAQUETTE – CALENDRIER – PUZZLES – BOÎTES DE CUBES – LES FILMS FIXES)
COLLECTIONNEURS ET COLLECTIONS (pp. 124-128)
COUVERTURES ET COTES DES DIFFÉRENTES EDITIONS DE L’ALBUM – BIBLIOGRAPHIE – EDITIONS ÉTRANGÈRES ET TRADUCTIONS RÉGIONALES

Voici mon avis détaillé sur le contenu.

I. Préface

Journal 1943

Nous sommes immédiatement plongés dans le contexte historique de la parution de l’album : l’essentiel de l’actualité étant bien évidemment la chute du fascisme en Italie et les bombardements en Europe. Instructif, plaisant à lire et utile.

Les sources de l’œuvre

Une demi-page de texte et 4 illustrations, sans aucun lien avec le texte en plus ! A nouveau, je défends l’idée que cette section sert d’introduction à la suivante… sans plus.

Revue de détails

Elle est plus courte que dans l’album précédent, de sorte que la préface dans son ensemble est également plus courte. Mais c’est pour laisser la place aux Dupondt dans la Postface, j’y reviendrai… Dans cette « revue de détails », les auteurs nous parlent des sources d’inspiration d’Hergé pour le scaphandre, le Sirius, les colonnes publicitaires et le calendrier gravé par le chevalier de Hadoque sur une croix en bois. Enfin, les auteurs relèvent la présence d’un Zazou dans l’album, un détail qui m’avait totalement échappé ! Une vraie découverte (même s’il s’agit d’un détail, comme l’annonce d’ailleurs l’intitulé de la rubrique).

Les Secrets d’une création

Les auteurs poursuivent leur revue de détails, illustrée de nombreuses vignettes issues des planches originales, en évoquant les sources d’inspiration d’Hergé pour la cave du brocanteur, le Sirius, le requin avide de coffrets en bois, le pendule de Tournesol, et ils évoquent deux détails supplémentaires : le nombre incohérent d’outils pour creuser (page 51 de l’album) et la collaboration d’Edgar P. Jacobs à la scène de la chute du journaliste (p. 56 de l’album).
Les trois sections (Source, revue de détails et secrets d’une création) méritaient à nouveau, comme pour l’album précédent, d’être traitées comme une seule section. Pour le reste, on y apprend beaucoup sur la façon dont Hergé se documente et prépare ses albums.

Les acteurs

Comme pour l’album précédent, c’est cette section qui a réellement mes faveurs. J’ai pris énormément de plaisir à la lire, et l’analyse du personnage de Tournesol est absolument pertinente et passionnante à découvrir. Je confirme, c’est véritablement cette section qui donne de la valeur à la préface.

Annonces et inédits en album

Comme dans l’album précédent, on découvre sur deux pages les annonces et les strips inédits en album mais parus dans Le Soir. Cette fois, en dehors de la case « Fin » avec une maquette de la Licorne, les autres cases sont bien des éléments participant au récit mais écartés par Hergé pour le montage en album.

II. L’album

Les 62 pages de pur bonheur que l’on ne présente plus. Une chasse au trésor haletante, l’apparition d’un personnage unique – Tryphon Tournesol, et un dénouement heureux s’il en est avec un Capitaine promu au grade de châtelain.

III. Postface

La préface est plus courte que dans l’album précédent, mais c’était pour faire de la place à la postface. Jugez plutôt : après 4 pages consacrées aux événements de la vie privée et activités professionnelles d’Hergé en 1943, les auteurs nous font un cadeau exceptionnel ! Les 40 épisodes de « Dupont et Dupond, détectives » reproduites dans leur intégralité sur 11 pages avec une courte introduction. Merci pour cette heureuse initiative. Rien que cette section confirme mon intérêt pour les « Archives Tintin ». Les dernières pages de la postface sont consacrées aux divers travaux d’illustration d’Hergé, et aux objets dérivés (calendrier, puzzle, etc.). L’album s’achève avec la section « Collectionneurs et collection » présentant les différentes éditions de l’album. L’occasion pour moi de découvrir cette édition spéciale « Journées notariales » de Tournai, accompagnée d’un fac-similé imaginaire de l’acte de vente du château de Moulinsart, conçu pour l’occasion. Un vrai bijou ! Enfin, chose étonnante, cette rubrique présente, illustration à l’appui, l’édition concurrente « France Loisirs » (double albums à couverture rouge).

Conclusion

Avec ce second album se confirme l’intérêt de cette collection. Elle permet de découvrir ou redécouvrir les albums désormais classiques, tout en accompagnant l’album d’un ensemble de documents et de textes pertinents pour comprendre la démarche artistique et le contexte dans lequel travaille Hergé lorsqu’il réalise cet album. L’objet en lui-même est très beau et très bien réalisé, ce qui ne gâche rien. Bref, j’attends avec impatience le prochain album qui, si j’en crois l’historique d’expédition dans mon espace client Atlas sera… l’Alph-Art… album polémique s’il en est !


Mon avis sur Les Archives Tintin (Atlas), vol. 1 – Le Secret de la Licorne

A présent que j’ai lu l’entièreté de l’Album « Le Secret de la Licorne », voici mon avis détaillé sur le contenu.

I. Préface

Journal 1942-43

Présentée comme s’il s’agissait d’un véritable journal, cette section de 3 pages relate les événements marquants de l’actualité de l’époque sous forme d’articles courts et situe ainsi parfaitement le contexte historique de la parution de l’album. Instructif et agréable à lire.

Les sources de l’œuvre

Cette courte section de 4 pages approfondit encore le contexte historique de l’album : en raison de l’occupation Allemande, Hergé a des contraintes lorsqu’il choisit le thème et la destination des aventures de Tintin. Ensuite, les auteurs évoquent brièvement le château de Moulinsart et son modèle, le château de Cheverny. Je suis un peu resté sur ma faim, mais cette section sert en réalité d’introduction à la suivante…

Revue de détails

Dans cette rubrique fourre-tout, au demeurant fort intéressante, on en apprend plus sur : les raisons de l’absence relative d’automobiles dans cet album, les costumes portés du temps du Chevalier de Hadoque, les vaisseaux de la marine Française de l’époque, un ouvrage dans lequel Hergé a puisé abondamment pour cet album, la façon dont étaient calculées les coordonnées géographiques par les marins de l’époque (important pour situer l’île sur une carte), et une foule d’autres détails (armures, vocabulaire marin, grade militaire du Chevalier de Hadoque, etc.).

A ce stade, j’ai le sentiment qu’il manque parfois un peu de « structure » dans cette Préface. Mais ça n’enlève rien à la qualité et l’intérêt du contenu.

Les Secrets d’une création

Jusque là, le lecteur a eu droit à des illustrations issues directement des albums ou à des reproductions d’autres documents, non-hergéens (photos de presses, illustrations de livres ayant inspirés Hergé, etc.). Dans cette section, on peut enfin découvrir quelques illustrations originales (carnet de croquis, dessins, etc.). Il est dommage qu’elles ne portent pas toutes une référence… C’est le cas de la magnifique illustration représentant Tintin et Milou au marché aux puces, avec une mise en couleur dans des tons plus « pastel » que dans les albums, pour laquelle aucune référence n’est donnée. Dommage.

Quant au texte, il aborde à nouveau un tas de sujets différents : l’intérêt récent d’Hergé pour les objets de marine, l’évolution des dessins de la Licorne, le travail de recherche d’Hergé en matière de manœuvres navales, l’incident du pavillon pirate mal attaché, le cahier qu’Hergé tient en vue de la publication de l’histoire en album, etc. Le sentiment de « manque de structure » persiste ici. Secrets d’une création et Revue de détails auraient pu être regroupés en une seule section. Mais le contenu reste intéressant et de qualité.

Les acteurs

Dans cette section, la plus longue de la préface (13 pages), les auteurs passent en revue les personnages majeurs et secondaires qui apparaissent dans l’Album. Pour les personnages familiers (Tintin, Milou, Haddock, les Dupondt), ils insistent sur l’évolution des personnages par rapport aux albums précédents. Pour Tintin, par exemple, les auteurs commentent l’évolution graphique du personnage, mais aussi l’évolution vestimentaire qu’Hergé lui fait subir.

Pour les personnages secondaires, les auteurs pêchent parfois par souci d’exhaustivité. Ils n’ont rien à dire sur « Barnabé » par exemple, le court paragraphe qui lui est consacré se contente donc de décrire le personnage sur le plan physique et de résumer son rôle dans l’album. Par contraste, les paragraphes consacrés à Aristide Filoselle donnent lieu à une véritable analyse du personnage. C’est bien là que réside la valeur ajouté de cette rubrique par rapport au « Dictionnaire des noms propres Tintin » de Cyrille Mozgovine ! Une mention particulière, enfin, pour l’analyse très pertinente du personnage de Nestor, ainsi que pour l’encart consacré aux concierges dans les aventures de Tintin. C’est ce genre de contenus qui font toute la richesse des « Archives Tintin ».

Annonces et inédits en album

La rubrique la plus attendue par les tintinophiles passionnés. Celle où on fait l’inventaire des différences entre la version parue dans le journal Le Soir, et celle publiée sous forme d’album. Elle se limite à deux pages : la première reprend quatre illustrations publicitaires pour l’album, parues dans Le Soir, la seconde reprend les vignettes parues dans Le Soir et non-reprises dans l’album. Simple, bref mais efficace.

Sur le coup, je suis partagé entre « un petit commentaire aurait été la bienvenue » et « c’est vrai que je n’ai pas besoin qu’on m’explique pourquoi Hergé a rayé ces cases ou séquences de l’album ». Par exemple, le dernier Strip paru dans Le Soir n’a pas été repris dans l’album pour la bonne et simple raison qu’il s’agit d’une sorte de « teaser » pour le second épisode, à venir, le Trésor de Rackham le rouge, suivi de l’annonce faite par Tintin du feuilleton en images « Juck & Jimbo » qui remplace temporairement Tintin dans Le Soir.

II. L’album

Après la préface, l’œuvre. Les 62 pages de l’aventure sont bien connues et appréciées de tous, elles se passent de commentaire.

III. Postface

Rubrique également intitulée « Pendant ce temps… Hergé ! ». Les auteurs y évoquent d’abord, sur trois pages et chronologiquement, les événements qui touchent à la vie personnelle d’Hergé (ce qui paraît de lui et dans quelles publications, les rencontres qu’il fait, etc.). Les pages comportent des photographies de périodiques et livres de l’époque, ainsi que la reproduction de la planche originale de la première page de l’Album.

Ils enchaînent ensuite en détaillant la production d’Hergé de ces années : les séries de Hergé parues dans la presse, les illustrations faites par Hergé pour des cartes postales (les reproductions des cartes postales s’étendent sur sept pages, avec un index des cartes – on suspecte la patte de l’archiviste Philippe Godin, même s’il n’est crédité que pour la section « Les Secrets d’une création »). Certes, ces quelques pages sont loin d’égaler ce qu’on trouve dans les volumes de « Chronologie d’une œuvre », mais les choix opérés sont judicieux.

 

Ainsi, les trois pages consacrées à l’édition, c’est-à-dire au travail fourni par Hergé pour Casterman, sont particulièrement intéressantes dans cet album. En effet, en 1942, Casterman décide de remplacer les couvertures des albums à « petite vignette » par des couvertures illustrées en pleine page ! C’est donc cette année là qu’Hergé re-dessine les couvertures des albums déjà parus, et on découvre ici la plupart des couvertures qui nous sont encore familières aujourd’hui. Un moment très important dans l’évolution des albums.

Conclusion

Avec ce volume des « Archives Tintin », Jean-Marie Embs et Philippe Mellot réussissent le pari de rester accessibles au « grand publique » tout en suscitant l’intérêt des tintinophiles « passionnés ». Les documents présentés en pré- et en postface sont pertinents et de qualité, les textes ne tombent pas dans le piège de l’étude « universitaire » de l’œuvre et de ses sources. Un moment d’immersion, plaisant pour l’amateur et le passionné, dans le monde d’Hergé et de Tintin, mais aussi de notre histoire (celle avec un grand H) qui se dessine en filigrane de l’ensemble de l’œuvre d’Hergé.